Le givre sonique de Candélabre

Si vous ne connaissez pas Candélabre, il est temps de découvrir ce trio qui fait honneur aux années glorieuses de la coldwave et du shoegaze.

Originaires de Toulouse, Cindy Sanchez au chant, Anthony Herigny à la guitare et Michaël De Almeida à la basse et au clavier se sont formés en 2017 à la suite d’un concert où leurs groupes respectifs jouaient ensemble (dont Lisieux, leur formation néo-folk). Si leur passion pour la musique des années 80 et 90 les a fédérés, ils reconnaissent que c’est grâce à leurs goûts divergents – en passant de la musique électronique au metal – qu’ils acquièrent une complémentarité et qu’ils créent l’univers singulier, à la fois sombre et cristallin, de Candélabre.

En février 2018, leur premier EP sobrement intitulé S/T sort et inaugure par la même occasion le label toulousain indépendant Solange Endormie Records (dédié aux genres cold-wave, post-punk et minimal) en étant leur premier groupe signé. BLWBCK. Life Is A Walkman, une autre maison de disque issue de la ville rose spécialisée dans le drone, l’ambient, et n’importe quelle musique capable de « procurer simultanément plaisir et tristesse » a également pris Candélabre sous son aile. Le groupe s’est produit dans de nombreux lieux phares de la musique indé de la ville tels que Le Dada, Le Rex ou encore L’usine à musique.

Candélabre se définit sur son site internet comme édifiant « de petites chapelles soniques dans lesquelles langueur et tension sont la clef de voûte », et lorsque l’on écoute les cinq titres de S/T, force est de constater que l’univers musical du trio confère à une religiosité sonore que Cocteau Twins n’aurait pas reniée. Le timbre aérien et puissant de Cindy comblera les adorateurs de Cranes ou Lush, et la basse brumeuse est nappée d’une contagieuse mélancolie digne de The Chameleons. La mélodie lancinante de « Carrion Season » subjugue l’album de son énergie spectrale, comme héritée des cieux.

Candélabre prépare un album qui devrait sortir cette année et sera en concert à la Cave à Rock le 18 juin aux côtés de Parking Dance et de Superficial Single Boy.

https://candelabre.bigcartel.com/

Siouxsie and the Banshees : 7 titres qui ont influencé les 80’s !

Siouxie and the Banshees

Le 27 Mai dernier Siouxsie Sioux, chanteuse du célèbre groupe anglais Siouxie and the Banshees (qui vécu un temps dans le Sud Ouest de la France) a célébré son 60ème anniversaire !

C’est l’occasion parfaite de rendre hommage à un des groupes de Post Punk les plus célébrés de la terre, en vous faisant découvrir 7 titres emblématiques des 80’s sans lesquels la face du monde de la musique d’aujourd’hui serait vraiment différente.

1 ) HONK KONG GARDEN – 18 Août 1978

Classée directement n°7 dans les charts anglais et produite par Steve Lillywhite (Peter Gabriel, Rolling Stones ou encore Morrissey), la chanson s’inspire d’événements racistes impliquant des skinheads contre la communauté chinoise de Chinatown.

En raison de son côté plus « mainstream » que les autres titres issus des groupes de musique Punk de l’époque, Honk Kong Garden donne naissance au terme de « Post Punk », employé par la presse anglaise pour cataloguer ce nouveau genre musical à mi chemin entre la pop et le punk et ainsi définir la musique produite par des groupes comme Wire ou Joy Division. Siouxsie and the Banshees s’est rendu célèbre quelques moi auparavant en 1977 en enregistrant pour la BBC, deux « Peel Sessions » très remarquées alors même que le groupe n’est pas encore signé sur une maison de disque.

2) HAPPY HOUSE –  30 Mars 1980

Issu du troisième album studio  intitulé « Kaleidoscope », le titre dénonce les abus de la société de consommation. Budgie, batteur et compagnon de Siouxsie Sioux apporte au titre une rythmique unique et réinvente un son qui préfigure ce que sera la Cold Wave notamment grâce aux guitares de John McGeoch (Magazine, Visage, Public Image Limited). Dans le clip promo, Siouxie Sioux apparaît les yeux charbonneux soulignés de Khol et habillée d’un costume d’Arlequin rose et noir qui semble s’intégrer au sol de la maison dont la géométrie impossible fait penser aux motifs du peintre néerlandais M.C. Escher et renforce l’idée d’une situation illogique. Les jeunes filles de l’époque s’emparent du look de Siouxsie Sioux et ce style vestimentaire va envahir les rues de Londres et les magazines de mode tels que Vogue.

3) CHRISTINE – 30 Mai 1980

Continuant d’inventer les 80s en créant la plus belle des histoires de la musique anglaise et du féminisme dans la musique, elle revient avec un titre sur les personnalités multiples qui raconte l’histoire de Christine, une fille au 22 visages. Une chanson inspirée de l’histoire vraie de Chris Costner Sizemore, une américaine schizophrène dont l’histoire avait été relatée dans différents livres à succès à la fin des années 70. En ajoutant un Flanger M117R sur ses guitares, John McGeoch continue de parfaire l’identité musicale du groupe ainsi que sa renommée. Celui-ci quittera le groupe en 1982. A noter qu’il existe une reprise de Christine par les Red Hot Chili Peppers jouée en 2001 pendant le V2001 festival et une autre par Simple Minds sortie sur une compilation en 2009.

4) ISRAEL –  28 Novembre 1980

En 1980, Polydor décide de sortir un single non issu d’un album, et ce qui semble comme un suicide commercial va devenir un hymne et consacrer le groupe définitivement comme le fervent défenseur d’une musique sombre et mystique du début des années 80. En live, Siouxsie habillée et maquillée à l’égyptienne, emprunte les images du peintre Klimt pour parfaire son style. Elle électrise le public qui saute et scande avec elle « Israel… in Israel ». Comme Bowie avant elle, Siouxsie Sioux va emprunter aux arts visuels et à la peinture, son maquillage romantique, ses tenues vestimentaires années 30 et définir un style unique et reconnaissable qui survit toujours aujourd’hui au travers des groupes et des fans de musique gothique. Cette chanson consacre définitivement l’icône « pop » et la déesse d’un monde sombre.

5) SLOWDIVE – 1er Octobre 1982

Premier single issu du cinquième album studio « A kiss In The Dream House ». Le groupe incorpore pour la première fois de son histoire des arrangements de cordes sur plusieurs titres, et des sessions sont enregistrées aux mythiques studios londonien Abbey Road. Ce sera le dernier album enregistré avec le guitariste McGeoch et définitivement, l’album le plus « arty » de ce début des années 80. Enrichi de nombreux effets sur les parties vocales, et enluminé d’instruments plus classiques comme des cloches ou de l’orgue, cet album va définir un son et une démarche artistique que des labels indépendants comme 4AD vont s’accaparer.  Ce n’est pas innocent si le titre de cette chanson deviendra bien des années plus tard le nom d’un des groupes fondateurs du shoegazing…

6) DEAR PRUDENCE – 1984

QUIZZ : Sauras-tu retrouver qui se cache dans cette reprise des Beatles, issue de l’album Hyæna (version 2009) entièrement composé avec cet invité de marque ? (Réponse à la fin de cet article)

7) CITIES IN DUST – 18 Octobre 1985

Il s’agit du premier single extrait de l’abum « Tinderbox ». Ce titre renoue avec l’urgence et la musique Post Punk des débuts du groupe mais il va aussi marquer la fin d’une période et du son de la première moitié des 80s. En décrivant la fin de la cité de Pompei, sans le savoir, Siouxsie décrit la fin de l’âge d’or de la musique Post Punk. Derrière elle, les Cocteau Twins ou encore Dead Can Dance, propulsés par l’excellent label indépendant 4AD, sont allés bien plus loin dans la recherche d’une esthétique radicale et ont ainsi acquis le statut de demi-dieux d’une « Pop Arty ». Ils vont détrôner la déesse dans le cœur des amateurs qui va plutôt s’attacher, après 1985, à rendre populaire sa musique en la rendant plus accessible. Entre temps le poulain de Siouxsie Sioux, Robert Smith, son double masculin maquillé et coiffé comme elle, a conquis le cœur de l’Europe entière avec The Cure ….

Réponse au QUIZZ: Après avoir assuré l’intérim pendant quelques mois en 1979, Robert Smith prend une nouvelle fois le relais et devient à son tour le guitariste officiel des Banshees de 1982 à 1984. Il enregistre avec eux le single Dear Prudence, une reprise des Beatles qui sort en 1984 aux Etats-Unis et se classe rapidement dans les charts et compose avec Budgie et Siouxsie Sioux l’album « Hyæna »

Jane Weaver, nouvel album aujourd’hui !

Jane Weaver

Le 13 avril dernier on vous faisait découvrir le single « Slow Motion » de la mancunienne Jane Weaver, pour lequel nous avions un petit coup de coeur.  « Did you see Butterflies », le nouveau titre de l’album « Modern Kosmology » qui sort aujourd’hui emprunte à la vague revival shoegaze une lente montée rythmique avec des guitares entêtantes et répétitives qui pourraient nous rappeler un peu les guitares produites par Robin Guthrie pour l’album « Spookie » des Lush (4AD). Jane Weaver nous prouve une fois de plus qu’elle n’a pas qu’une seule corde à son arc et qu’elle fait rimer le mot métamorphose avec le mot virtuose. Elle jouera à La Maroquinerie à Paris le 2 Juin.

Chronique : Slowdive – S/t (2017)

Voilà plus de cinq mois que le dernier album éponyme de Slowdive est sorti sur Dead Oceans. Cinq mois nécessaires pour digérer une attente de près de 22 ans (Pygmalion datant de 1995), qui auront permis de prendre un peu de recul sur ce LP (et qui justifient cette chronique tardive). Ce qui surprend d’abord à la première écoute, c’est l’homogénéité du disque et sa cohérence dans la discographie du groupe. Il faut dire que dès l’introduction de Slomo, le titre d’ouverture, on se retrouve en territoire connu : grosse réverbération éthérée, nappe de sythé à gogo et delay de guitares arpégées en-veux-tu-en-voilà. Des arrangements qui viennent d’ailleurs plus rappeler la période Souvlaki du groupe que celle de Pygmalion. Droits dans leurs baskets, les membres du groupes mettent de côté les expérimentations sonores qui avaient fait la sève de leur dernier album deux décennies plus tôt, et malgré leur quadragénitude, nous font bien savoir qu’ils ont toujours vingt ans dans leurs têtes. Les rythmiques énergiques de Don’t Know Why et Everyone Knows accentuent cette impression, ou bien le très adulescent No Longer Making Time, idéalement calibré pour faire du vélo au coucher de soleil dans sa résidence pavillonnaire, en se croyant en plein film de Greg Araki. Mais c’est quand le groupe décide de prendre son temps qu’il est le plus convainquant, osant proposer de la nouveauté dans son répertoire, comme sur l’ultra-pop Sugar for the Pills, chanté par un Neil Halstead au timbre très proche d’un Matt Berninger. Où sur le magnifiquement introspectif Falling Ashes, où l’arpège de piano répétitif et les entrelacs de voix scandent un « thinking about love » qui dégage son lot de romantisme aérien .

Alors qu’on notera la prédominance du chant masculin, reléguant trop souvent la talentueuse Rachel Goswell au rôle de backing vocal, cette cuvée 2017 à de quoi désarçonner. Bien qu’au niveau du son, tout sonne plus gros et plus dense qu’avant – l’incursion de Goswell chez Mogwai avec le super groupe Minor Victories pouvant apporter un élément de réponse à cette évolution – Slowdive échoue à surprendre, et offre un album duveteux, flattant le fan dans l’attente, à la prise de risque minime et (trop) calculée. Alors que l’époque est propice au revival shoegaze (allez écoutez Nothing, Ringo Deathstarr, ou Cigarette After Sex pour vous faire une idée), le groupe nous montre surtout ici que Slowdive, c’est avant tout une formule. Une recette de grand-mère dont on avait perdu le moule, et que l’on retrouve avec excitation. On pensait en avoir oublié le goût, mais il revient nous frapper à la première larmichette. Cependant, le problème avec la formule, c’est son côté déclinable à outrance et sa propension à la standardisation qui nous fait nous interroger aujourd’hui sur la pertinence d’une telle reformation (comme pour celles d’At The Drive-In ou de Lush d’ailleurs). Heureusement que Slowdive 2017 est parsemé de très belles chansons, car le groupe n’est pas passé loin de transformer la croustade de ma mère-grand en goûter Figolu.

A écouter en priorité :

Sugar for the Pills :

No Longer Making Time :